Mes chers camarades, Chers amis,
Ce 1er mai, nous sommes à l’aube d’une double séquence électorale, et après avoir passé des mois à faire de l’entre-soi sur la gouvernance, je lis dans la presse que ces élections seront marquées par la question « identitaire ». Mais quel est donc ce mot qui fait irruption dans le vocabulaire des commentateurs et des journalistes ?
Lorsqu’il s’agit de se choisir un nom, une appellation, un sigle, le marketing politique recommande aujourd’hui de privilégier les désignations positives.
Les extrémistes ont compris le message. C’est ainsi que les anti-avortement se sont baptisés pro-vie. Dans le même esprit, des groupuscules de l’extrême droite française décidaient voici 15 ans de s’appeler « identitaires ». Vous les avez sans doute vus, il y a quelques jours, Section d’Assaut de luxe dans leurs petits anoraks bleus, jouer à la milice dans le massif alpin pour bloquer une migration imaginaire.
Bref « identitaires », c’est l’appellation marketing pour dire xénophobes, c’est le nom qu’ont choisi les racistes pour se présenter devant l’opinion.
Chers camarades, la lutte des idées commence sur le terrain du vocabulaire. Les mots passent et les concepts suivent. Sur ce plan là, soyons conscients que la cause du progrès, de l’humanisme, des Lumières commence à reculer.
Les réfugiés sont devenus des migrants, la xénophobie devient identitaire, les démocrates demain seront définitivement des droitdelhommistes. Il n’y a guère que les jeunes qui restent des arabes même quand ils sont nés belges selon notre Secrétaire d’Etat à l’asile et aux célébrations des anciens collaborateurs.
La ficelle est pourtant usée tant elle est connue : c’est une vieille routine de la droite et des conservateurs que de couvrir leurs politiques antisociales en excitant les tensions contraires et en stigmatisant les différences.
Si le 1er mai est devenu un symbole, c’est parce qu’il consacre la primauté du combat social ! Ce sont les travailleurs qui se réunissent sur la ligne de front pour célébrer les avancées, déplorer les reculs, se fixer de nouveaux objectifs !
Le combat social ne se livre pas que sur le champ économique, sur le terrain de l’entreprise. C’est le combat pour le droit des gens, pour plus d’égalité, pour que la liberté ne soit pas un privilège.
De ce point de vue, la stratégie « identitaire » de la droite n’est pas qu’une diversion. Elle frappe les digues de la dignité et porte directement atteinte à la cause du progrès et des libertés.
Plus aucune avancée sur le plan éthique depuis mai 2014 et le droit à l’euthanasie des mineurs ou la filiation directe pour les couples de femmes. Au contraire, c’est à la dignité des plus démunis et de ceux qui travaillent avec eux que l’on s’en prend par le biais du secret professionnel.
Et que dire de cette loi sur les visites domiciliaires qui fait de la solidarité un délit.
Aujourd’hui, certaines tendances politiques, certaines forces économiques, répandant l’idée que le socialisme est derrière nous, qu’il est une idée passéiste et conservatrice.
Le socialisme serait, en fait, devenu, une illusion voire même un mensonge ! Parce que l’on ne tiendrait que l’austérité et la compétition pour vérités.
Ceux qui veulent faire du socialisme une voie criarde d’opposition, anti-constructive, sont tous ceux qui préféreraient ne pas voir ce qu’il y a d’injuste, d’inéquitable et d’indigne dans ce monde.
Il faut de la force pour lutter contre les injustices et chercher partout l’équité : celle des chercheurs d’emploi et des familles précaires, que l’on tient pour responsables de leur situation, que l’on accuse de complaisance et de profit.
Cette injustice qui fait reposer la charge de l’ensemble de nos systèmes économiques de marchés et de capitaux, sur les seuls qui en sont exclus.
Nous, Socialistes, nous savons qu’il n’en est rien, que nous avons le devoir d’ouvrir des droits, de leur donner une réalité concrète.
A Bruxelles, la Garantie pour la Jeunesse met en œuvre le droit de chaque demandeur à un accompagnement, à un emploi, une formation ou un stage.
Et cela fonctionne : notre Région connaît une baisse continue du chômage et du chômage des jeunes en particulier, avec une diminution consécutive de bientôt 59 mois, en deçà du niveau d’Anvers ! Le travail à accomplir reste immense mais notre détermination est intacte.
A Bruxelles, la réforme des allocations familiales permettra à 3 familles sur quatre, celles qui en ont le plus besoin, de voir leur montant d’allocations augmenter dès 2020 ! Nous voilà sorti de la vieille logique nationaliste du soutien à la natalité au profit d’un principe généreux de solidarité sociale.
Alors, aux sceptiques, aux hargneux, aux ambitieux, aux envieux, nous disons calmement : sur ces questions, comme sur d’autres, l’on voit bien la responsabilité, morale, qu’il y a à ne pas abandonner notre idéal au banc du relativisme des opinions et en quoi, à nouveau, le socialisme fait la différence. En quoi, finalement, nous pouvons être fiers.
Mes chers camarades, Chers amis,
La primauté du combat social ne nous rend pas aveugles pour autant.
La dérive populiste de la droite soulève sous tous les horizons de bien sombres nuées. Le vent mauvais que l’on fait souffler sur les braises de la peur et la désespérance attise jusqu’à l’incandescence le rejet et la haine de tout ce qui est différent.
Je le dis haut et fort, il y a une augmentation de l’antisémitisme, dans les actes et dans les paroles, à Bruxelles comme partout en Europe. Je ne veux pas oublier que des gens sont morts récemment dans ma ville pour le seul fait d’être juifs.
Il y a aussi, une augmentation de l’islamophobie, dans les actes et dans les paroles, à Bruxelles, comme partout en Europe. Il y a encore une croissance des manifestations racistes à l’égard des africains et des roms. Il y a des agressions à caractère homophobe. Il y a des discriminations permanentes dans l’accès au logement, dans l’accès à l’emploi.
C’est notre devoir à nous socialistes, internationalistes, filles et fils des Lumières, de dénoncer et de combattre toutes les formes de racismes et de discrimination. Ce combat ne se segmente pas.
Il n’y a pas d’un côté le racisme qu’il faut pourfendre et d’autres dont on pourrait s’accommoder. Ce combat est un et indivisible. Il ne peut y avoir de priorités dans nos indignations. Il ne peut y avoir de complaisance en nous, pour ce dont nous souffrons par d’autres.
Nous, Bruxellois, notre véritable identité, c’est d’en avoir plusieurs. C’est bien pour cela que les nationalistes et les xénophobes nous détestent tant. Eux ne veulent voir dans un individu, qu’une seule langue, une seule religion, une seule culture, une seule couleur de peau. Ils veulent réduire l’être humain à une communauté nécessairement homogène.
Me reviennent en tête les mots d’Amin Maalouf dans les Identités meurtrières qu’évoquait voici quelques jours Christiane Taubira, à l’Université libre de Bruxelles – mon Alma mater :
« C’est notre regard qui enferme souvent les autres dans leurs plus étroites appartenances, et c’est notre regard aussi qui peut les libérer ».
Notre véritable identité, camarades, c’est d’en avoir plusieurs. Et si l’une est agressée, bafouée, humiliée, c’est tous ensemble que nous devrions en souffrir. Bruxelles sans les juifs n’est pas Bruxelles. Bruxelles sans les athées n’est pas Bruxelles. Sans les chrétiens, les musulmans, les bouddhistes. Sans les Wallons, sans les Flamands, les Italiens, les Marocains, les Congolais, les Espagnols, les Polonais, les Portugais, et j’en oublie et j’en oublie…
L’universalisme de nos combats est un gage de la cohérence de notre action. Personne ne gagne à élever une cause au-dessus des autres, ou à alimenter les fractures du quotidien.
Et Amin Maalouf, encore, de m’aider à conclure : « Pour aller résolument vers l’autre, il faut avoir les bras ouverts et la tête haute, et l’on ne peut avoir les bras ouverts que si l’on a la tête haute. »
Alors, camarades, allons la tête haute, résolument vers l’autre, pour ouvrir de nouveaux droits et convaincre toujours plus de la pertinence de la gauche !
Bon 1er mai à tous.