Déclaration de politique générale prononcée par le Ministre-Président - jeudi 19 octobre 2023
communiqué de presse
19 octobre 2023
Monsieur le Président,
Cher(e)s collègues,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Je ne peux commencer cette allocution sans évoquer l’attentat qui a touché notre capitale ce lundi soir.
Je voudrais d’abord, au nom du Gouvernement bruxellois, présenter nos plus sincères condoléances au Gouvernement et au peuple suédois, et tout particulièrement aux familles et proches des deux victimes.
Ce lundi noir, un homme en a tué deux autres, simplement parce qu’ils portaient un maillot qui les identifiaient comme citoyens d’un pays contre lequel cet homme nourrissait une haine issue de prétendus préceptes religieux.
Cet acte ignoble porte en lui la négation de nos valeurs les plus fondamentales en ce qu’il ôte la vie d’un être humain au simple prétexte de sa nationalité, au nom de précepte religieux dévoyés.
On aimerait que cet acte puisse être qualifié de délire d’un individu malade. Mais on sait que ce délire est provoqué, guidé, attisé par une propagande haineuse déployée notamment sur le net, via les réseaux. Une propagande qui utilise le mensonge, pour exciter la haine envers la Suède.
Et au-delà de la Suède, c’est notre modèle démocratique que l’on vise.
C’est la liberté d’opinion, la liberté d’expression, le libre choix de sa vie intime que l’on attaque.
C’est la primauté de la loi civile sur la loi religieuse que l’on conteste.
Et c’est notre modèle de vivre ensemble démocratique que l’on veut ébranler.
Ce sont les mêmes manipulations à l’œuvre quand des mensonges sont répandus sur la mise en œuvre de l’Education à la vie sexuelle et affective à l’école pour effrayer des parents, pour fracturer notre société.
Mais nous ne cèderons pas. Nos démocraties résisteront au fanatisme, ce monstre qui ose se dire le fils de la religion [Voltaire]. Et Bruxelles ne cèdera rien de son modèle de vivre-ensemble pacifique.
Comme Bruxelles s’est relevée des attentats en 2015-2016, la vie a repris déjà après cet acte, certes moins ravageur, mais issu du même obscurantisme. Bruxelles n’a pas cédé à la peur.
Grâce à une bonne communication avec les autorités fédérales – et j’en remercie ici le Premier Ministre – toutes les mesures de sécurité nécessaires ont été prises, sans entraver outre mesure la vie de nos citoyens.
Je veux devant vous, représentants élus des Bruxellois, remercier vivement nos forces de l’ordre et toutes les disciplines de la sécurité, qui se sont mobilisées pour assurer la neutralisation rapide du tueur et la protection de nos citoyens. Je veux aussi adresser un remerciement à tous ceux qui ont continué à véhiculer nos concitoyens ce soir-là, malgré le danger diffus d’une menace non localisée. Je pense bien sûr aux taxis, qui ont vu la voiture d’un des leurs, qui venait de déposer les victimes, prise pour cible par le tireur. Je pense évidemment aussi aux chauffeurs de la STIB, qui ce lundi soir ont permis aux Bruxellois, et notamment ceux coincés au Stade Roi Baudoin, de rentrer chez eux en sécurité, et dès le mardi matin, très tôt, de se rendre au travail.
Mais c’est toutes les Bruxelloises et tous les Bruxellois que je dois remercier de n’avoir pas cédé à la peur, mais d’avoir respecté les consignes de prudence et de vigilance,
sans panique,
sans que la ville ne s’éteigne,
sans que la vie ne reflue,
sans concéder un centimètre de terrain au terrorisme.Les Bruxellois sont courageux, dignes et solidaires.
Ces Bruxellois, Mesdames, Messieurs, ont droit à la sécurité et la tranquillité. Si lundi les forces de l’ordre, zones de police et police judiciaire comme les autres services concernés, ont remarquablement travaillé, nous constatons depuis longtemps à quel point justice et police bruxelloises manquent de moyens. Face au terrorisme, à la grande criminalité organisée, aux mafias de la drogue, au trafic international d’armes, à la traite des êtres humains, il faut doter nos services d’enquête de moyens humains, techniques et financier de loin supérieurs. Le procureur Fédéral a sonné l’alarme quand les services ont percé le réseau SKY-ECC et découvert l’ampleur du danger que représente pour nos démocraties l’infiltration de ces mafias. Violence extrême, corruption, chantage, menaces. Nos services de police et judiciaire sont sous pression dans nos grandes villes. Nous l’avons répété cet été face à la situation autour de nos grandes gares, dans lesquelles le trafic de drogue prend une place certaine. Certains ont voulu n’y voir qu’un parapluie que Bruxelles ouvrait face à quelques « gouttes ». Il s’agit bien plus que des gouttes mais un déluge de violence et d’argent criminel qui nous menace. Et il ne s’agit pas de s’opposer à l’Etat fédéral dans un ping-pong stérile, mais de donner à nos services de sécurité les moyens indispensables à leur travail.
Mesdames, Messieurs, j’en appelle à ce Parlement : au-delà de nos désaccords politiques ne soyons pas aveugles face à la réalité du danger. Et soyons unis pour réclamer des moyens pour nos services de police bruxellois. La Région fera sa part, en augmentant encore les montants qu’elle consacre, hors de toute compétence et responsabilité institutionnelles, à doter la Police Judiciaire Fédérale de Bruxelles notamment de matériel informatique et technologique de pointe, par le biais de Safe.brussels.
De même, dans le cadre du Plan pour rétablir la sécurité et la tranquillité autour de la Gare du Midi, nous faisons notre part, en prévoyant notamment de nouveaux budgets pour la prise en charge des personnes dépendantes. 4 M€ seront dégagés pour ouvrir une nouvelle salle de consommation à moindre risque, ainsi qu’un espace d’accueil résidentiel pour le public très précaire souffrant d’assuétudes.